Voici une recette que je tiens de mon voisin Indien. Il la prépare à l'occasion de diverses fêtes, même si certains rattachent cette recette au Basant Panchami. On mange couramment ce plat lors des mariages ou des naissances.
Il n'est pas d'usage de prendre quelque chose de sucré à chaque repas, donc cette préparation sucrée prend une valeur particulière. Mes voisins ne prennent pas de dessert au quotidien mais lors des grandes fêtes, on peut en présenter plusieurs.
C'est une recette dite Marwari, ces gens issus du Rajasthan et qui mangent une nourriture riche et épicée, tout en conservant une certaine éthique de végétarien strict. Ils ne mangent d'ailleurs pas d'ail ou d'oignons, car les dieux n'en mangeaient pas.
Vous noterez à ce propos que la recette fait appel à du Ghee qui est du beurre clarifié. On obtient du beurre clarifié par chauffage de beurre doux, puis par filtrage dans un linge en coton des couches supérieures, considérées comme impures. Le Ghee est une source très importante dans l'alimentation Marwari, et très populaire en Inde. On trouve du Ghee dans les épiceries spécialisées mais alternativement, on peut substituer de l'huile.
Pour faire du Meetha Chawal pour 6, il faut commencer avec 250g de riz Basmati que l'on laisse reposer une heure dans de l'eau. On fait ensuite cuire le riz normalement dans de l'eau sans sel. Evitez à tout prix de faire trop cuire le riz. Mieux vaut du riz pas assez que trop cuit. On égoutte le riz et on le laisse à part. Le reste de la recette ne dure qu'une vingtaine de minutes.
Dans un kadhai, wok ou poêle, on fait chauffer 8 cuillères de Ghee ou d'une autre matière grasse. On y met 4 clous de girofle (laung), 4 cardamomes vertes écrasées ou au moins ouvertes (choti elaichi) et un bâtonnet d'écorce de cannelle brisé (dalchini). La cardamome et la cannelle en poudre sont possibles, mais sont moins bonnes. Mon voisin ajoute aussi de la noix de muscade râpée. Le principe commun à de nombreuses recettes indiennes est de commencer par faire chauffer les épices dans de la matière grasse pour qu'elles développent tout leur parfum.
On y ajoute un verre d'eau, 300g de sucre et une toute petite cuillère de pistils de safran que l'on aura préalablement mis dans de l'eau quelques minutes. Le safran a des valeurs particulières du point de vue nutritif pour les enfants et pour les personnes âgées. Le safran peut être espagnol, l'important étant d'utiliser des pistils et non de la poudre. Mon voisin utilise du sucre de canne chinois dilué et du sucre brun. On mélange sous feu normal jusqu'à ce que le sirop prenne consistance, sans pour autant caraméliser. Cela peut prendre une dizaine de minutes.
On ajoute le riz et mélangeant avec attention pour ne pas abîmer le tout, à feu doux, pendant 15 minutes où jusqu'à ce que l'ensemble soit asséché, qu'il n'y ait plus de liquide. On peut alors retirer du feu et ajouter 25g d'amandes blanchies ou effilées (badam), 25g de pistaches en morceaux (pista) et 25g de pignons (chilgoza). On mélange doucement et l'on sert chaud dans un plat décoré de pistaches et d'amandes entières.
L'usage de fruits secs s'explique par le fait que le Rajasthan est essentiellement un désert. De plus, les Marwaris sont attachés à l'art de la cuisine dans son sens plastique et alimentaire. Ces fruits secs répondent à cet objectif. On aurait aussi pu mettre des raisins secs ou de la noix de coco, mais l'apport des fruits secs à la présente recette est de rendre le tout un peu craquant. C'est une question de texture.
On déguste le Meetha Chawal avec du lait bouilli avec du safran et du sucre, servi chaud. Pas d'alcool de toute façon, mais toutes les boissons courantes sont possibles.
Comme vous le constatez, cette recette est facile et pourtant exceptionnelle. Les Indiens pratiquent très peu le sucré/salé, et le goût traditionnel français sera peut-être perturbé par le fait qu'il n'y a pas du tout de sel dans cette préparation, mais c'est délicieux et subtil. Au-delà des millénaires traversés, j'espère que le Meetha Chawal vous plaira.